La communication interpersonnelle
INTRODUCTION
Bien avant les dessins rupestres et les premières
traces de l'écriture, les hommes ont communiqué leurs connaissances, leur
savoir, leur expérience, leur peur, leur joie et leurs aspirations. En effet, à
travers le travail, le façonnement des matières premières à leur disposition et
l'aménagement de l'espace dans lequel ils devaient se reproduire et vivre, ils
ont dû transmettre non seulement des techniques et des gestes, mais aussi des
traditions, des attitudes, des émotions et des sentiments.
Les dessins mettant en scène d'une part, des séquences
de chasse ou des cérémonies sociales et d'autre part, les instruments - depuis
ceux en pierre taillée -les armes, les ustensiles, les bijoux et les objets
retrouvés dans les sépultures attestent non seulement de l'existence en communauté
de l'être humain, mais surtout de sa volonté d'assurer sa continuité dans la
mémoire future de ses semblables et de garantir une protection non orale à la
transmission de ses modes de vie, de son organisation sociale et de ses
valeurs. L'histoire des hommes se conservait avec eux et se transmettait avec
ce qui la différenciait des autres.
Les pyramides d'Egypte ou d'Amérique, tout comme les
mausolées de Lénine ou de Mao, sont là pour attester et communiquer au delà de
la survie de tout langage, écrit ou parlé, le statut particulier d'une
personne, d'une époque ou d'une option politique. La communication s'est donc
faite pour conserver l'espèce et la protéger, proclamer des supériorités et les
perpétuer et finalement assouvir des passions, libérer des imaginations ou les
aliéner.
La décision de communiquer une information, d'en suspendre la
diffusion ou de la distribuer sélectivement est l'exemple classique donné pour
illustrer les pouvoirs de la communication. En outre, le choix d'une langue
donnée, d'un registre linguistique, d'un médium ou d'une forme d'expression au
lieu d'autres alternatives disponibles est un autre exemple de ces pouvoirs. En
effet, chacune de ces variables possède le potentiel d'influencer les
comportements et d'agir sur les attitudes et les croyances des personnes et des
groupes de personnes.
La communication est une nécessité pour tous et à tous
les niveaux de l'exercice de l'autorité. Par ailleurs, la pratique de la
communication appelle des dispositions, des organisations et des précisions
dans la définition de ses objectifs, de ses formes et de ses affectations.
Devant l'intérêt grandissant suscité par la
communication dans le cadre des relations humaines et socio-professionnelles,
il convient de mener la réflexion sur les techniques et les méthodes à mettre
en oeuvre pour réussir cet acte.
La
communication est un impératif pour toute personne s'engageant dans des
relations impliquant l'exercice du pouvoir ou la soumission à son autorité. La
maîtrise de son processus complexe requiert de la part des parties
communicantes une disponibilité aussi bien physique que psychologique.
Elle peut néanmoins être sujette à des altérations si
un ensemble d'attitudes et d'aptitudes ne sont pas adoptées ou acquises.
I - LE PROCESSUS DE BASE DE LA
COMMUNICATION
Une communication interpersonnelle correcte entre les
personnes ne se produit que si les idées, les faits, les attitudes ou les
sentiments que l'émetteur cherche à transmettre sont bien compris et
interprétés par le receveur. Des facteurs internes de même que des facteurs
externes entraînent souvent, chez les personnes, des perceptions inexactes et
une communication interpersonnelle de qualité médiocre.
11- L'émetteur et
le receveur
La communication interpersonnelle exige évidemment deux
personnes ou davantage. Etant donné qu'elle comporte souvent de nombreux
échanges entre les personnes concernées, il est arbitraire de dire qu'une
personne est l'émetteur et une autre le receveur
. Elles échangent en effet constamment leurs rôles, tout dépend de la position
qu'occupe chacune à un moment du processus.
Les objectifs de l'émetteur et du receveur influencent
considérablement le processus de la communication. Par exemple, l'émetteur peut
chercher à atteindre certains buts par le moyen de la communication ; il peut
s'agir pour lui de compléter ou de changer les idées, les attitudes ou le
comportement du receveur, ou encore de modifier sa relation avec celui-ci. Si
le receveur n'est pas d'accord quant au but poursuivi, on verra très vraisemblablement
se produire des distorsions et des malentendus au cours de la
communication ; plus faibles seront les divergences des interlocuteurs
quant à leurs buts, leurs attitudes et leurs valeurs, plus grande sera la
probabilité de réaliser une bonne communication.
12 - Les
transmetteurs et les récepteurs
Les termes transmetteurs et récepteurs se réfèrent
aux moyens disponibles pour qui veut envoyer et recevoir des messages. Dans la
communication interpersonnelle, ces termes impliquent généralement l'usage de
nos sens : la vue, l'ouïe, l'odorat, le toucher et le goût. La transmission
peut donc mettre en jeu des moyens verbaux et non verbaux. A partir du moment
où il commence, le processus de communication échappe à la maîtrise absolue de
l'émetteur. Un message qui a été transmis ne peut être repris. Combien de fois
n'avons-nous pas pensé en nous -mêmes : "Je regrette d'avoir dit ça".
13 - Les messages,
les canaux de transmission et le bruit
Les messages comprennent les données transmises et les
symboles codés qui sont sensés attribuer des significations particulières aux
données. L'émetteur espère toujours que les messages soient interprétés dans le
sens qu'il a voulu leur donner. Pour comprendre la différence qui existe entre
la signification d'origine et le message reçu, rappelons-nous une occasion au
cours de laquelle nous avons essayé de communiquer nos pensées intimes et nos
sentiments d'amour, de rage ou de peur à un tiers. N'avons-nous pas pensé qu'il
était difficile ou quasiment impossible de faire comprendre le sens profond de
notre message? Plus la différence est grande entre le message d'origine et
l'interprétation qu'on lui donne, plus la communication interpersonnelle est
défectueuse. Pour qu'elle se produise, l'émetteur et le receveur doivent avoir
quelque chose en commun. Les mots et les symboles non verbaux n'ont pas de
signification propre ; leur signification est créée par l'émetteur et le
receveur.
Les canaux sont les moyens par lesquels les messages de
l'émetteur parviennent au receveur. Par exemple, un dialogue peut être porté
par l'atmosphère au cours d'une conversation entre des personnes présentes, ou
par une ligne téléphonique. Le bruit
est tout ce qui crée une interférence avec le message tel qu'il est transmis
par le canal. Un poste de radio diffusant une musique bruyante pendant qu'une
personne essaie de parler à une autre est un exemple de bruit. Pour le
surmonter, il convient de répéter le message ou d'en augmenter l'intensité.
14 - La
signification, le codage et le décodage
Le message de l'émetteur est transmis aux récepteurs
du receveur ou aux sens de celui-ci par des canaux. La forme symbolique des
messages reçus est transposée en une forme qui présente une signification. Les significations correspondent aux
idées, valeurs, attitudes et sentiments d'une personne ainsi qu'aux situations
dans lesquelles elle se trouve.
Le codage permet de traduire les significations
en messages aptes à être envoyés. Le vocabulaire et les connaissances jouent un
rôle important dans la capacité du codage de l'émetteur. Les professionnels
éprouvent souvent des difficultés à communiquer avec le grand public parce
qu'ils ont tendance à coder les significations sous une forme qui ne peut être
comprise que par d'autres professionnels du même domaine. Par exemple, les
contrats qui intéressent directement les consommateurs sont souvent rédigés de
telle façon que seuls des juristes pourront les coder et les décoder.
Le décodage
est la traduction des messages reçus qui prennent alors la forme de
significations interprétées. Grâce à l'utilisation d'un langage commun, les
personnes peuvent décoder de nombreux messages de sorte que les significations
reçues soient aussi proches des significations transmises. Si on a essayé de
communiquer en français avec une personne qui ne parle que l'anglais ou
l'allemand, on sait déjà combien il est important de disposer d'un langage
commun pour le codage des messages.
Ainsi, la qualité d'une communication interpersonnelle
est évaluée par comparaison avec l'état
idéal. Il y a état idéal quand les significations voulues par l'émetteur et
leur interprétation par le receveur sont identiques. Mais pour que la
communication soit efficace, certaines conditions doivent nécessairement
exister.
II - LES
CONDITIONS DE LA COMMUNICATION.
La disposition à communiquer est la première condition
pour un échange cohérent, significatif et efficient. En d'autres termes, pour
que le processus de communication s'installe normalement, les co-acteurs
potentiels doivent être disponibles les uns aux autres. En effet, toute
distraction de l'une des parties est une cause de rupture du processus ou de la
réduction de son potentiel. La disponibilité en question concerne
essentiellement deux grandes formes, la disponibilité physique et la
disponibilité psychologique.
21 - La
disponibilité physique
Elle
comprend la nécessité d'un véhicule reconnaissable et disponible aux deux
parties et des conditions optimales pour son fonctionnement. Dans le cas le
plus simple et peut-être le plus courant, celui de l'échange verbal en face à
face, le véhicule physique est le langage ou le langage des signes pour les
sourds muets. Les conditions optimales sont la maîtrise mutuelle de ces
langages et la capacité de percevoir, enregistrer et interpréter leurs signes.
Un aveugle ne peut, par exemple, dialoguer avec un sourd muet par le langage
des signes car il ne peut voir les gestes de son interlocuteur. Le sourd muet
peut, par contre, voir les gestes de l'aveugle, si ce dernier a appris ce
langage, mais ne peut lui répondre et il n'y aura pas de communication entre
eux.
Par ailleurs, un message dont un nombre de signaux
sont perdus ou affectés durant la transmission perd de sa valeur et de son
immunité et risque donc d'être contaminé. En outre, la contamination d'un
message peut survenir suite à la différence des références sémantiques, des
charges émotionnelles et affectives des différentes composantes verbales et non
verbales du langage des co-acteurs.
La qualité de l'environnement dans lequel se fait la
communication l'affecte beaucoup. Une salle de cours glaciale, mal éclairée,
résonnant à la voix d'un enseignant et au bruit d'une chasse d'eau mal réglée
lui permettra moins de motiver ses élèves à son cours qu'une autre plus
confortable dans laquelle la concentration sur l'enseignant et son discours est
favorisée par l'absence de toute source de distraction.
22 - La
disponibilité psychologique
Elle fait
référence à la disposition relative ou absolue d'une personne à entrer en
contact avec d'autres ou avec une autre spécialement. Elle est relative car
elle peut être momentanée ou définitive, concerner un sujet donné ou encore
exprimer un refus total de toute interaction. Dans tous les cas, la
disponibilité psychologique influence les attitudes, l'appréciation initiale
qui détermine l'impression que l'on se fait des autres et donc le devenir et
l'issue de tout le processus de communication. Il est donc important de
programmer la communication pour qu'elle intervienne pendant les moments de
disponibilité psychologique optimale.
De même, la disponibilité psychologique s'influence
par un nombre de facteurs dont certains se rapportent au communicateur
lui-même, à l'anticipation des co-acteurs et à leurs réactions tant verbales
que non verbales. D'autres ont trait aux langues utilisées, à la nature du
message et des divers enjeux qui y sont associés. Un orateur dont la voix n'est
pas agréable pour une raison ou une autre, dont l'aspect vestimentaire ne
l'associe pas chez les co-acteurs avec un profil qu'ils anticipaient ou dont
l'âge ne lui confère pas, dans leurs esprits, le respect et l'autorité
nécessaires pour parler d'un sujet donné, est un orateur qui ne sera pas écouté
et dont le message sera reçu avec beaucoup d'appréhension et d'incertitude.
Il est donc nécessaire de concevoir la communication
comme un processus complexe impliquant les co-acteurs, leurs histoires
cognitives et affectives, leurs systèmes de valeurs, ainsi que les objectifs,
la structure et l'opportunité du message.
23 - La
communication est un continuum
Le processus de la communication est donc un continuum
au sein duquel s'inscrivent des actes et s'ancrent des situations mettant en
contact des personnes dont la nature et le degré des relations sont variables,
évolutives et s'influençant mutuellement. En effet, les objectifs et/ou les
intérêts qui mettent des co-acteurs en contact ne naissent pas nécessairement
au moment de cette première mise en rapport. Chacun a, fort probablement, une
expérience individuelle et une histoire spécifique avec ses intérêts, la recherche
de leur satisfaction et les efforts d'en tirer le plus d'avantages et de se
défendre des abus, des inconvénients et des préjudices qu'il y associe. En
outre, chacune des parties a développé une méthode personnelle pour approcher
ces intérêts : un langage particulier pour en parler, une logique propre pour
les analyser et une stratégie spécifique pour les faire valoir.
Le premier contact de deux co-acteurs dans un
processus de communication n'est en fait jamais le premier ou il ne l'est que
dans la mesure où c'est la première rencontre de deux individualités qui ont
toujours cherché à satisfaire des besoins complémentaires, similaires ou
conflictuels. De même, la séparation de deux co-acteurs ou la sortie de l'un
d'eux d'un acte de communication ne rompt pas nécessairement le processus et ne
met fin, ni aux intérêts qui les ont mis en contact, ni aux échanges de
messages qui ont eu lieu pendant leur rencontre.
En effet, la participation à un acte de communication
commence avant même la mise en contact physique et directe des co-acteurs et
continue beaucoup après leur séparation. Les participants connaissent, par
exemple, le thème et le programme d'une conférence plusieurs jours avant la
date de la réunion, ce qui les active, les mobilise intellectuellement et
affectivement autour d'un débat qui n'a pas encore lieu; l'audience développe
ainsi des structures d'anticipation des systèmes d'évaluation, prépare des
questions, voire des réponses à des questions non encore posées. Les orateurs
sont scrutés avant même qu'ils ne se présentent à la salle de conférence.
Souvent, on entend des plaintes d'auditeurs frustrés par l'absence d'un orateur
à qui ils avaient préparé non pas des questions mais des commentaires et des
critiques. Après un exposé et les débats qu'il a suscités dans la salle de
conférence, des discussions suivent souvent sur les pages de journaux ou de
publications spécialisées.
Par ailleurs, les conclusions des exposés savants et
des articles scientifiques sont souvent des ouvertures sur des débats futurs,
des anticipations ou des recommandations d'action. Dans tous les cas, la
conclusion est une participation à un débat qui n'a pas encore commencé et dont
les fondements théoriques n'ont peut-être pas encore été imaginés. Le processus
de communication ne s'arrête donc pas à l'issue d'un acte donné; il continue et
se transpose à d'autres opportunités de communication, dans d'autres médias,
avec d'autres audiences, voire d'autres objectifs.
En outre, puisque les actes de communication sont en
fait la reprise d'autres actes que des co-acteurs ou tous les co-acteurs n'ont
pas initié ou auxquels ils n'ont pas participé auparavant, ils sont alors
fondés sur des positions, des attitudes et des analyses rappelant d'autres
personnes qui ont influencé le cours communicatif et qui ne sont, peut être,
plus présentes. C'est ainsi que le poids de personnes ou de groupes de
personnes qui ne sont plus présentes peuvent peser sur des négociations.
De même, la force de caractère, la crédibilité, le
charisme et d'autres atouts dont une personne a besoin lors d'un acte de
communication peuvent s'emprunter. En effet, une personne devant intervenir
devant une audience qui ne la connaît pas peut s'investir, en partie du moins,
des caractéristiques charismatiques ou mobilisatrices d'une autre personne
connue de cette audience et s'y lier par des complicités qu'elle avait avec
l'autre personne. La personne de référence peut être réelle ou non, mythique ou
fictive. Dans certains cas, elle peut même ne pas être connue personnellement
par l'audience. C'est le cas d'un orateur qui fait référence à l'image du père,
du chef spirituel ou une autre image symbolique dans laquelle se reconnaît
l'audience. La citation d'un verset du Coran, la référence au héros d'un roman,
d'une série de télévision, d'une guerre de libération, d'une organisation
sociale ou politique ou d'une période de l'histoire d'un groupe donné, sont
autant de manières pour emprunter des caractéristiques pouvant motiver une
audience et s'en investir pour communiquer avec elle. L'identification de
l'audience avec ces figures symboliques et les attitudes qu'elle a envers elles
deviennent des moyens de transfert entre les co-acteurs.
24 - Le
raisonnement, la logique et la persuasion
L'important donc dans un processus de communication
n'est pas la logique intrinsèque mais sa perception par les différents
partenaires. Il n'est pas non plus le fait d'exprimer une logique mais d'en
convaincre les co-acteurs. En effet, un critère important de la mesure de la
qualité d'un argument étant l'influence qu'il réussit à avoir sur les
co-acteurs ciblés ; c'est sa capacité de leur communiquer cette logique, et non
la logique elle-même qui détermine leur adhésion au message.
La qualité de tout acte de communication est fonction
du degré de la maîtrise du sujet sur lequel portent les échanges. Plus
l'expérience personnelle est intense, plus la communication sera effective et
convaincante.
Le fondement des arguments sur des faits précis,
tangibles et quantifiés accroît la valeur de persuasion. Les statistiques, par
exemple, donnent à un message plus de crédibilité que des expressions générales
de l'importance ou de l'ordre de grandeur d'une incidence donnée.
Les attitudes et les opinions sont plus affectées par
des récits qui rapportent des exemples de comportements et des cas précis et
qui illustrent les arguments par des descriptions détaillées.
Alors que la description d'un processus exprimée sous
forme d'une assertion-affirmation ne constitue pas en elle seule un argument,
elle contribue à en faire un si elle est associée à une autre pour la valider,
l'évaluer ou la soutenir. En d'autres termes, c'est la relation d'une
description à une autre partie du discours qui en détermine la fonction et la
pertinence dans le processus de raisonnement.
III - RÉUSSIR LA
COMMUNICATION
La prédisposition à l'efficience de la communication
se caractérise par un ensemble d'attitudes et d'aptitudes qui, quand elles font
défaut à une personne la pénalisent ; ces attitudes peuvent cependant
s'apprendre et s'acquérir.
31- Les
caractéristiques d'un bon communicateur
Un bon communicateur est celui qui maîtrise la
tentation de vouloir imposer ses opinions, dirige les échanges et en contrôle
l'évolution. En effet, un message s'adressant directement à une personne ou à un
groupe de personnes et dont l'intention est perçue comme voulant contrôler
leurs comportements aura beaucoup moins d'effet que si ces mêmes personnes se
sentaient impliquées dans la discussion, ou dans un effort intellectuel
d'analyse ou d'évaluation. C'est ainsi que la tendance à se replier et à se
cantonner derrière des attitudes défensives se retrouve beaucoup plus face à
des discours directs et des tentatives de manipulation du comportement que face
à des discussions ou à la recherche de solutions à des problèmes précis. De
même, la réaction par la désaffection et le désintéressement caractérise le
co-acteur ayant perçu de l'arrogance, de la distance, de la froideur, du
dogmatisme et le manque d'humilité dans un acte de communication qui cherche à
l'influencer mais qui ne sait pas lui montrer de l'intérêt et de la
sollicitude.
Toute personne s'engageant dans un processus de
communication doit développer la capacité d'écouter les co-acteurs et de leur
donner l'occasion d'exprimer leurs opinions, leurs frustrations et leurs désirs
même quand ils s'écartent des objectifs principaux de l'acte de communication
en cours.
32 - Les règles
d'efficacité de la communication
C'est celui auquel on s'adresse qui est le plus
important. En effet, on peut être l'émetteur le plus titré; si l'autre ne nous
comprend pas, la communication n'existe pas. De même, notre message peut être
le plus profond, si l'autre ne le comprend pas c'est comme si nous n'avions
rien dit, pire même car l'autre à l'avenir risque de ne plus nous écouter.
Alors que si nous faisions un effort, comme émetteur, de nous mettre à la
portée du récepteur, en adaptant notre message à sa capacité de compréhension,
alors nous serons compris et la communication aura lieu.
Celui qui parle doit être compétent. Il doit, avant la
réunion, réfléchir à ce qu'il va dire de façon à aborder le problème traité
avec clarté, en le situant dans son contexte et en fonction des objectifs de la
réunion. Mais la compétence sur le contenu est insuffisante si, en outre, on n'est
pas compétent sur la façon de transmettre un message clairement et simplement,
et si l'on ne connaît pas les éléments à mettre en oeuvre dans toute relation
avec les autres.
Il est toujours possible d'expliquer de façon claire
les problèmes compliqués. Un message sera d'autant plus facile à transmettre de
façon claire que l'animateur sera compétent sur le sujet, qu'il aura étudié et
le maîtrisera. Ceux qui jargonnent, camouflent ainsi souvent leur incompétence
à communiquer, voire même sur le contenu.
33 - Le retour de
communication ou le "feed-back"
Pour que l'ajustement entre l'intention de l'émetteur
et l'attente du récepteur puisse se réaliser, pour que le décodage des signes
utilisés soit pertinent, une "communication en retour" émanant du
récepteur va être nécessaire.
A l'origine cette communication récurrente ou
"feed-back" était utilisée dans l'armée, lors des communications
radio par les troupes en opérations. Le technicien récepteur reformulait le
message qu'il venait d'enregistrer, ce qui permettait de rectifier sur le champ
les erreurs de transmission.
Mais en matière de relations humaines, lorsqu'on parle
de feed-back, il ne s'agit pas, pour le récepteur, de jouer le rôle d'un simple
écho qui ne ferait que reformuler, c'est -à -dire répéter mécaniquement le
message initial. Il n'y aura vraiment "communication en retour" que
si le récepteur est capable d'intégrer le message de l'autre au point de
pouvoir en réexprimer, sans déformation, le contenu, mais aussi les sentiments
qu'il implique et pas toujours explicités par l'émetteur.
Ceci suppose une disponibilité très grande, une
attention maximale à tous les signes verbaux et non verbaux. Cela demande aussi
du temps, alors que bien souvent nous sommes pressés, nous ne voudrons pas
perdre de précieuses minutes en vérifications qui ne nous paraissent pas
utiles.
Pourtant, si après quelques instants d'entretien, nous
parvenons à réaliser que notre interlocuteur et nous-mêmes sommes sur deux
voies parallèles ou même opposées, alors
qu'au point de départ nous pensions
cheminer sur la même voie, que de temps perdu à revenir en arrière, dans
l'hypothétique espoir de localiser le point où nous nous sommes écartés l'un de
l’autre!
La réexpression peut être employée d'une manière
permanente, mais elle ne doit pas être systématique, aveugle ; il ne s'agit pas
de redire chaque phrase mais de se centrer sur celles qui marquent les étapes
significatives du cheminement des deux interlocuteurs. Cela permet d'éviter des
incompréhensions et des gaspillages d'énergie.
Dès que le thème de l'échange est vraiment impliquant
pour les partenaires, la passion qu'ils risquent d'y investir va très souvent
les empêcher de s'écouter réellement ; ils vont préparer leurs arguments et
leurs répliques au lieu de suivre la pensée qui leur est communiquée. C'est
alors que la réexpression serait également la plus utile, et c'est en ce cas
que l'on pense le moins à y recourir.
Nous avons du mal à réaliser que l'emploi du
feed-back, que le retour de communication, ne signifie pas que nous approuvons
ce qui vient d'être dit mais bien, que nous acceptons ce " dit " de
l'autre, que nous reconnaissons cet autre dans son droit d'avoir une pensée
personnelle, autonome par rapport à la notre.
En acceptant de réexprimer pour lui ce qu'il vient de
nous livrer, nous lui donnons la possibilité de mieux sentir ce qu'il pense, de
préciser ses idées. A entendre son message ainsi reflété, l'émetteur peut le
considérer plus objectivement et aller plus en avant dans le cheminement de sa
réflexion.
Ainsi, le retour de communication ou le feed-back,
atteint sa plénitude, réalise sa finalité lorsqu'il permet aux deux
interlocuteurs de cheminer ensemble, de progresser, de dépasser sans cesse
chacun des moments de leur rencontre. La réexpression prend son sens
lorsqu'elle facilite cette progression, quand celle-ci se fait plus laborieuse,
quand certains obstacles se dressent sur le chemin commun. Le développement de
la communication, dans un entretien, appelle donc les apports personnels et
successifs de chacun, un renouvellement permanent et original de l'échange,
faute de quoi, en quelque sorte, la communication cesserait, se détruirait par
manque de " nourriture " par absence d'aliment.
34- L'aptitude à
s'exprimer
L'aptitude à communiquer oralement a longtemps été
considérée comme l'apanage des politiciens, par opposition à la capacité de
lire et d'écrire des documents sérieux associée traditionnellement à
l'administrateur type. Toutefois, on commence à se rendre compte que l'image du
responsable assis derrière un bureau couvert de paperasses ne correspond plus
aux exigences de l'époque.
S'il veut réussir, le responsable moderne doit
emprunter un peu au politicien: il doit apprendre à motiver ses collaborateurs
en échangeant avec eux, en les persuadant de le suivre. Il doit savoir
communiquer efficacement.
Chez les véritables communicateurs, on observe la
présence de trois caractéristiques fondamentales : le désir de s'exprimer, le
magnétisme et la spontanéité.
Le
désir de s'exprimer:
Pour intéresser un auditoire, il importe avant tout
d'être soi-même intéressé à ce que l'on fait. L'attitude du communicateur par
rapport au sujet est extrêmement contagieuse. Bien sûr, il ne suffit pas de
parler de quelque chose qui nous passionne pour capter l'attention d'autrui, il
faut parler à l'autre, le rejoindre, l'atteindre ; c'est toute la
différence entre s'écouter parler et se faire entendre. Si on veut être
entendu, il est essentiel de répondre d'une certaine façon aux besoins de ses
auditeurs, d'établir avec eux un lien informel, de personne à personne ;
sans cette relation, aucun message n'est transmis.
Le magnétisme:
Il est très important, pour établir une bonne
communication, de "passer la rampe", c'est -à- dire de dégager assez
de magnétisme pour que les messages soient reçus et retenus.
Il est admis que quatre-vingts pour cent de la
communication est non verbale. Cela signifie qu'il faut décoder et comprendre
beaucoup plus l'attitude de la personne qui s'exprime par ses mots.
Celui qui parle sans expression théâtrale et qui
essaie de se faire comprendre seulement par l'intellect commet une grave
erreur. Ce qui importe avant tout, c'est que la personne extériorise ce qu'elle
ressent et qu'elle ait une certaine intensité dramatique. C'est à ce moment
qu'entre en jeu le magnétisme.
La spontanéité:
La
puissance de la communication verbale par rapport à d'autres formes d'échange
provient de la possibilité d'ajustement progressif entre l'émetteur et le
récepteur. Les bons communicateurs ont le sens de la repartie, ils sont
totalement présents dans la communication et réagissent rapidement. Leur force
de persuasion découle beaucoup plus de leur spontanéité que de l'exactitude ou
de la profondeur de leurs réponses. En situation d'interaction, il vaut mieux
une réponse courte et simple sur le champ qu'un savant exposé de quarante pages
le lendemain. L'individu qui se donne des délais pour fournir des réponses
documentées est déphasé et perd beaucoup d'efficacité.
CONCLUSION
La communication est un
processus continu d'influence mutuelle, mais généralement inégale, en raison de
l'inégalité des statuts sociaux, économiques, culturels, interpersonnels et
institutionnels.
La maîtrise de la communication n'est pas égale à
celle de ses techniques, elle n'est pas non plus maîtrisée par le simple
exercice scolaire de ses méthodes, mais elle implique d'une part, l'engagement
total et maintenu dans les rapports humains tant au niveau individuel
qu'institutionnel et d'autre part, la conscience de la portée idéologique et
historique de ces rapports. En d'autres termes, la maîtrise de la communication
suppose la connaissance de l'homme, de ses motivations fondamentales, de ses
besoins essentiels, de ses préférences, de son expérience individuelle et de
ses aptitudes intellectuelles, cognitives et affectives.